Oiseaux, Les valeureux combattants
Oiseaux, Au nord du nord de l’Europe, dans la péninsule du Varanger, d’étranges oiseaux, les Combattants Variés, combattent dans une arène pour perpétuer l’espèce.
Entrez dans les coulisses de ce long et fascinant parcours pour venir les contempler !
Oiseaux, La parade des Combattants Variés est un spectacle sans nul autre pareil. Au cœur de l’arène, les fiers mâles sortent leurs plus beaux atours afin d’attirer l’attention de la femelle et de bénéficier de ses faveurs … au fin fond de la Norvège.
Les oiseaux, En route vers le grand Nord
Jacques Gillon et Christine Desvignes, photographes animaliers, grands voyageurs, membres fondateurs de l’association « Touchepasmamaison », sont allés à la rencontre de la faune sauvage de Scandinavie, mais un tel périple se mérite !
« Nous sommes partis le 15 avril 2007. Nous avons prévu un long circuit de quatre mois en van aménagé, confortable. Nous avons emmené une grande quantité de nourriture : conserves et produits de base avec l’intention d’acheter dans les villages des aliments frais car nous étions éloignés des grands axes de circulation, au nord du cercle polaire, en Laponie, à l’extrême nord-est de la Norvège ». Depuis la frontière du nord de la France, il faut compter quatre longues journées de conduite. Les routes sont bonnes, heureusement et agrémentées de rencontres savoureuses : grues cendrées, cygnes chanteurs, garrots à œil d’or, etc .
« Nous découvrons les premiers combattants après avoir franchi le pont Tana bru, sur la magnifique rivière Tana qui marque l’arrivée sur la presqu’île du Varanger. C’est là que logent ces fabuleux volatiles que nous devons photographier. Mais il n’est pas facile de repérer les instants de parade qui sont étalés sur une période de trois semaines environ, (entre le 15 mai et le 15 juin) », déclare Christine.
Dès le début du printemps, les oiseaux combattent sur un petit territoire, parfois aussi exigu que la dimension d’une assiette, à proximité d’une zone humide, au sol spongieux mais cette zone est âprement défendue.
Les oiseaux, Une espèce déroutante
Cette espèce est d’une grande diversité, dans la tenue extravagante affichée par les mâles au printemps.
« De cinquante chevaliers parés pour le tournoi, vous n’en trouverez pas deux vêtus de la même sorte » nous assure Alphonse Toussenel dans son ornithologie passionnelle. Les Lapons ont même un nom précis pour chacun d’eux, suivant la couleur de leur plumage. Ils distinguent le diacre, le roi soleil, le chambellan ; nous les avons surnommés : curé, matador et gendarme.
« Nous campons tout près des combattants en pleine journée car nous n’avons pas vu la nuit durant deux mois et demi ! La température à l’intérieur du van était de 1°C à 5°C ; nous avons chauffé pendant une semaine, mais nous n’avons pu continuer, craignant de dépasser nos réserves de gaz et de ne plus en retrouver. La température extérieure variait de 0°C à 8°C environ. »
Photographier ces oiseaux impose une bonne dextérité, toujours à l’affût d’images exceptionnelles, instantanées, uniquement en action. Jacques Gillon travaille au 300 mm avec un appareil très maniable et un multiplicateur x1,4 ou x1,7 et à main levée. Pour la précision et la netteté de l’image, il utilise une longue focale. Le problème technique de ce type de vue est effectivement de figer le mouvement des oiseaux.
« Pour les combattants variés, j’installe, dit-il,une petite tente en affût , à dix mètres des oiseaux et je me glisse parmi eux, je participe au spectacle tous les jours pendant un mois, j’attends le moment propice pour la parade. Sur un mois, dix jours seulement pour les photographier car les intempéries sont constantes : vent glacial, pluie, ciel tempétueux ! »
Les oiseaux, Une fantastique chorégraphie
Dans l’arène, on va distinguer les résidents, possesseurs d’un emplacement, les satellites qui essaient de s’en approprier un et les marginaux qui gravitent autour. Quand les femelles arrivent, c’est l’effervescence ! Les danseurs sont pris d’une folie collective. On se croirait au Moulin Rouge. La couleur du plumage et la taille sont les premiers atouts du chevalier combattant pour attirer les femelles.
Qui va remporter la victoire dans le ring ?
Les mâles se gonflent, étalent leurs corolles, dressent leurs oreillettes, prennent l’attitude de coq. Le dernier venu fonce vers le plus clair des mâles, le dégage en deux coups de boxe puis il reprend une place usurpée pendant son absence, s’installe en périphérie pour souligner son statut de satellite. Si un mâle réussit à couvrir la femelle, il n’est pas au bout de ses peines ; la concurrence arrive à grands sauts pour interrompre l’intimité naissante et s’essayer dans le rôle de reproducteur d’espèces. Du coin de l’œil, chacun surveille l’autre pour intimider l’adversaire et se faire remarquer « plus grand, plus haut, plus beau ». « Nous avons pu observer par la suite une femelle baguée comme une princesse et grâce à cette particularité nous avons pu constater qu’elle s’accouplait avec des mâles différents.
Les chevaliers simulent le combat avec des coups de bec. L’action est courte, pendant les assauts, le silence reste absolu. Le calme revenu, les femelles se promènent dans l’arène ; les mâles se pavanent, plumes au vent. L’accouplement se déroule dans l’indifférence générale.
Cette exubérance déconcerterait tout spectateur mais ne laisserait personne insensible. La pantomine dure environ un mois et les valeureux combattants reprennent le chemin de l’Afrique et autres lieux.
Quel voyageur curieux ne serait tenté à son tour d’explorer les sites de rencontre de ces combattants insolites, en parcourant des paysages grandioses, parsemés de lacs scintillants, où se confondent le ciel et la terre, baignés par la lumière du soleil de minuit ?
Cependant, cette péninsule se transforme peu à peu en raison de la pression humaine. Les zones humides sont asséchées et nos valeureux combattants sont condamnés à trouver d’autres arènes pour leurs ébats amoureux. L’arène la plus active est régulièrement perturbée par des pêcheurs de saumon qui ont construit une plateforme à quelques mètres.
Les oiseaux, Sur le chemin du retour
Le parc national du Dovrefjell en Norvège abrite des renards polaires, des rennes et plus particulièrement une importante population de bœufs musqués qui avaient pratiquement disparu et qui ont été réintroduits. Cet animal préhistorique est totalement imprévisible, il est préférable de l’approcher à une distance de sécurité de 200 mètres, d’autant plus que malgré sa demi tonne, il réalise des démarrages foudroyants.
« Subjugués par cette rencontre inopportune et émoustillés par un couple de naturalistes allemands, nous nous sommes approchés à quelques mètres en laissant la compagne du jeune naturaliste en arrière. Son comportement étrange nous a interpellés : l’an passé elle a été chargée par un bœuf musqué dans le bush ! » Cette explication nous a fait plonger avec précipitation derrière le premier rocher venu qui nous garantissait une pseudo sécurité.
« Le mois de juin se termine et nous entamons notre descente vers un site de nidification et de reproduction d’un autre oiseau mythique du grand nord : le plongeon catmarin ». Mais ceci est une autre histoire…
Encadré : L’association « Touchepasmamaison »
L’association « Touchepasmamaison », fondée selon la loi du 1er juillet 1901 a pour objet de regrouper les personnes motivées par la sauvegarde des espèces animales et de leur habitat. Pour sensibiliser le plus grand nombre de personnes, l’association utilise les moyens de l’image sous ses différents aspects : diaporamas, films, DVD, reportages réalisés par des amateurs naturalistes.
Encadré : Jacques Gillon
Dès ses débuts, en prise de vue sous-marine, dans les années 1970, Jacques GILLON a gardé le goût du voyage et un œil qui lui a valu plusieurs palmes d’or au festival du film sous-marin d’Antibes. Il travaille actuellement à l’illustration d’instants d’oiseaux, en collaboration avec Claude Feigné, ornithologue. Paraître aux éditions sud-ouest en mai 2008 . Il a obtenu le premier prix, catégorie oiseaux, lors du festival international de la photo animalière à Montier-en-Der en 2006.